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Rubrique : Le Podcast "Série Noire Pour Une Canne Blanche"

Épisode #7 : "Les Fourberies De L'Automne"

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Bonjour à toutes et à tous,

Je suis Lise Wagner, et je vous accueille dans ma "Série Noire Pour Une Canne Blanche".

"Série Noire Pour Une Canne Blanche", c'est le podcast qui vous fait découvrir les défis qu'affrontent quotidiennement les personnes qui, comme moi, voient le monde avec leurs mains et leurs oreilles.

Aujourd'hui, pour ce septième épisode, je vais vous parler des fourberies de l'automne. Car oui, cette saison perfide apporte avec elle des difficultés insoupçonnées pour celles et ceux qui n'ont pas, ou peu, le secours de leurs yeux.

Pour vous peut-être, l'automne, c'est la saison des arbres aux belles couleurs et de la douce lumière, des beautés dont je ne peux malheureusement profiter que par procuration. L'automne, pour moi, c'est la saison des jours qui raccourcissent, des feuilles mortes qui s'amoncellent au sol et des intempéries qui perturbent tous mes repères.

En automne, il ne vous aura pas échappé que la lumière baisse. Depuis une vingtaine d'années que j'ai accepté d'utiliser une canne blanche pour me déplacer, je ne redoute plus la tombée de la nuit. J'ai appris à m'appuyer sur des repères tactiles et sonores qui, heureusement, ne disparaissent pas avec le coucher du soleil. Mais ça n'a pas toujours été le cas. À l'époque où je pensais voir encore suffisamment pour me déplacer sans canne, l'approche du crépuscule était pour moi une terrible menace. Je redoutais particulièrement cette période que l'on appelle entre chien et loup, où tous mes repères étaient noyés dans une lumière grise. Ce n'est maintenant plus un problème pour moi. Mais je connais encore de nombreuses personnes malvoyantes pour qui l'automne est synonyme de couvre-feu, qui arrive de plus en plus tôt au cours de la saison. Je connais beaucoup de personnes qui restreignent leurs activités aux heures où la lumière leur permet d'avoir des repères visuels.

L'automne, c'est aussi le moment que les feuilles des arbres choisissent immanquablement pour rejoindre le sol. Certes, j'adore entendre le froissement des feuilles sous mes pas et sentir l'odeur de l'humus quand je me balade en forêt. Mais en ville, il en est tout autrement. Les tapis de feuilles mortes recouvrent tous les repères au sol, à commencer par les bandes podotactiles qui me permettent de repérer les passages piétons. Mais ce n'est pas tout. Sous un tapis de feuilles, il n'y a plus de différence entre un asphalte lisse et une bande de pavés. Il n'y a plus de bandes de guidage et parfois, il n'y a même plus les petits dénivelés qui me permettent de maintenir ma trajectoire ou de savoir quand je passe du trottoir à la chaussée.

Autre difficulté, et non des moindres, quand le sol est recouvert de feuilles mortes, il est difficile de conserver une technique de canne efficace. Comprenez-moi, pour éviter les obstacles qui encombrent les trottoirs, et il y en a beaucoup - je vous en ai parlé au dernier épisode - on apprend à effectuer un balayage de gauche à droite avec la canne, en alternance avec les pas, de manière à éviter les poteaux, les poubelles, les trottinettes, les terrasses de café, etc. etc. Mais quand à chaque va-et-vient, la canne emporte avec elle un tas de feuilles collantes, il est bien difficile de garder cette technique. Alors je me dis souvent que je ferais mieux de troquer ma canne contre un balai.

Et le remède est parfois pire que le mal. Pour contrer la terrible invasion de ces maudites feuilles mortes dans nos rues, nos parcs et nos jardins, des fabricants à l'imagination on ne peut plus fertile ont trouvé une solution démoniaque : les souffleuses. Car outre le fait que les souffleuses à feuilles consomment du carburant, polluent l'atmosphère et dégagent des nuages de poussière, elles font un boucan d'enfer. Et pour moi qui vois essentiellement avec mes oreilles, quand il y a du bruit, je ne vois plus rien. Impossible de retrouver mes repères sonores, impossible d'analyser les flux de circulation pour traverser la rue, impossible même de savoir si une personne s'adresse à moi pour me proposer son aide. Je n'ai alors qu'une seule envie : m'arrêter et attendre que ça passe. Dans ces moments-là, il vaut donc mieux que je sois confortablement installée sur un espace protégé plutôt qu'au beau milieu de la rue. Ensuite, les tas de feuilles formés par les agents de la ville armés de leur souffleuse restent parfois en place des heures durant et constituent alors de nouveaux obstacles.

L'automne, c'est aussi le retour des intempéries. Le froid d'abord qui engourdit les mains et anesthésie le toucher. Il devient alors compliqué de reconnaître les pièces de monnaie au toucher ou d'utiliser son smartphone pour déclencher son GPS en pleine rue. Mais aussi la pluie. Bien sûr, je connais peu de monde, voyant ou non, qui apprécient la pluie. Cela dit, rendez-vous compte que, quand on a une main prise par la canne blanche, prendre le parapluie de l'autre main ne nous en laisse aucune de disponible. Difficile alors de porter des sacs ou même d'ouvrir les portes. On peut certes aussi se protéger de la pluie en portant une capuche. Mais alors, ce sont les oreilles qui sont bouchées et à nouveau les repères sonores qui sont perturbés.

La pluie laisse aussi dans nos villes de nombreuses flaques d'eau. Je vous laisse imaginer ce que ça donne quand on ne peut pas les anticiper.

Bon, je vous rassure, toutes ces petites difficultés ne font que se rajouter à l'ordinaire et ne m'empêchent heureusement pas de continuer à me déplacer pour mes multiples activités.

J'ai quand même toujours une pensée émue pour ce qui partagent ma condition dans d'autres endroits du monde, par exemple au Canada où le sol est recouvert de neige ou de verglas pendant au moins quatre mois dans l'année.

J'espère que cet épisode vous a plu. Le mois prochain, nous retournerons dans le métro pour quelques aventures qui ne manqueront pas de vous faire frissonner.

Vous venez d'écouter "Série Noire Pour Une Canne Blanche", un podcast proposé par OKEENEA. Vous pouvez retrouver tous les épisodes de la série sur le webzine OKEENEA, webzine.okeenea.com, et toutes les bonnes plateformes de podcast.

Si cet épisode vous a plu, n'hésitez pas à le partager largement avec votre entourage.

Quant à moi, je vous retrouve très bientôt pour un nouvel épisode de mes aventures. Pensez à vous abonner pour être sûr de ne pas le rater. D'ici là, vous pouvez reprendre une activité normale. Portez-vous bien!

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